« Jusqu’à l’âge de sept ans, j’ai vécu dans le bois. J’ai grandi dans une tente, avec du sapinage. On se nourrissait de la nature. On prenait le temps. Ce n’était pas le temps dicté par la montre, mais le temps du bleuet, le temps du poisson, le temps du castor. »
Édouard-David Kistabish, Anishinabe (Algonquin)
« On changeait de campement au gré des saisons; c’était pour le gibier et la nourriture, on était nomades et semi-nomades. Quand il n’y avait plus de poisson dans nos filets, c’était le temps de partir, d’aller à un autre lac. Quand on n’attrapait plus de lièvres dans nos collets et que la perdrix était rare, c’était le temps de changer d’endroit pour les laisser se reproduire, pour qu’on ne manque jamais de nourriture. »
Ernest Ottawa, Atikamek Nehirowisiw
1. Communauté innu d’Unamen Shipu
Photographie : Laurent Jérôme
Les Musées de la civilisation (Québec), La Boîte Rouge vif et ARUC Tetauan
2. Richard Mollen, Innu
Photographie : Laurent Jérôme
Les Musées de la civilisation (Québec), La Boîte Rouge vif et ARUC Tetauan
3. Martin Mark et Richard Mollen, Innus
Photographies : Laurent Jérôme
Les Musées de la civilisation (Québec), La Boîte Rouge vif et ARUC Tetauan
« Quand le monde se réunissait, on faisait une fête. Les groupes qui étaient un peu partout sur le territoire, quand ils revenaient, ils ramenaient la graisse des caribous qu’ils avaient tués, puis on partageait. On appelait ça "makusham". »
Étienne Mollen, Innu
Après avoir passé l’hiver sur le territoire, à chasser et à trapper, au printemps ou au début de l’été les familles se rassemblaient et c’était une grande fête, un grand partage. Chaque nation avait ses lieux de rassemblement. D’autres rassemblements avaient lieu l’automne avant le départ des familles sur le territoire. Lors de ces rencontres, tout le monde apportait quelque chose, du castor, des oies, de la viande d’orignal.
Tous les animaux sauvages ont leurs utilités particulières. Ils nous servaient à nourrir la famille, à fabriquer des outils et des vêtements ou encore, à faire le commerce de peaux.
Les animaux étaient utilisés au maximum, rien n’était jeté et surtout, chaque partie avait son utilité. Chez les Inuit, lorsqu’un phoque était tué, on pouvait par exemple faire des jeux avec les osselets, des vêtements, des revêtements pour le kayak, et avec le gras, on nourrissait les chiens et on allumait le feu de la lampe traditionnelle, tout ça en plus de manger la viande.
Chez les Inuit, les muscles du béluga de même que les nerfs du caribou étaient utilisés comme cordes ou comme fils pour la couture. Pour nettoyer la tente, l’aile de l’outarde ou la queue de la perdrix faisait office de plumeau. Les Naskapis utilisaient la mâchoire d’une truite comme peigne et les Innus, le dessous de la queue du porc-épic comme brosse à récurer.
La grande ingéniosité des peuples autochtones se constate dans cette habileté à transformer les ressources existantes en de nouveaux objets utiles au quotidien.
1-2. Plumeaux (ailes d’oie)
Les Musées de la civilisation, 66-48 et 66-49
Photographies : Jessy Bernier – Perspective
3. Jeu d’osselets
Les Musées de la civilisation, 68-3467
Photographie : Jessy Bernier – Perspective
4. Brosse à peigne (peau de porc-épic)
Les Musées de la civilisation, 74-579
Photographie : Jessy Bernier – Perspective
5. Brosse à récurer (queue de porc-épic)
Les Musées de la civilisation, 92-15
Photographie : Jessy Bernier – Perspective
« Avant de devenir chasseur, il faut que l’enfant apprenne d’abord qui est l’animal, à ne pas avoir peur de lui et à le respecter. Le respect est une valeur fondamentale du bon chasseur. Plus il respecte ses outils, plus il a une chance que l’animal se présente à lui. Plus ses vêtements sont beaux, plus l’animal reconnaît qu’il le respecte et il s’offre davantage à lui. Les esprits viennent le voir, lui transmettent des choses, lui donnent des informations pour qu’il puisse réussir sa chasse. »
Anne-Marie André, Innu
1-3. Chasse à la perdrix blanche
John-Thomas Ambroise, Innu, 12 ans
Photographies : Mendy Bossum-Launière
« Pour que tu puisses entrer en contact avec les esprits, il te faut comme outils le tambour, les amulettes, des longues-vues (un bâton vide à travers lequel toi seul peux voir, au loin), les omoplates brûlées ou le fœtus du caribou que tu dois faire cuire et donner aux aînés. »
Anne-Marie André, Innu
La divination avec les os, appelée scapulomancie, était une pratique importante pour les familles vivant sur le territoire.
« Une fois, mon père et mes frères devaient partir trois jours pour aller installer des pièges à l’intérieur des terres. Après six jours, ils n’étaient pas encore revenus. Ma mère m’a donc demandé d’aller faire la chasse à la perdrix.
Après avoir mangé la perdrix, elle a pris l’os qui se trouve au milieu de la poitrine, elle l’a passé dans le feu et m’a dit : « Tu n’as pas le droit de regarder ».
Quand l’os a été refroidi, elle l’a repris dans ses mains, puis elle a commencé à l’observer. C’était comme si elle lisait un livre. Elle a ensuite dit : « Ils vont très bien, c’est parce qu’ils ont croisé du caribou, ils seront de retour demain après-midi. C’est possible de faire une erreur, mais à ce que je vois, ils auraient tué neuf caribous ».
C’est à la nuit tombante que j’ai enfin vu mon père et mes frères arriver avec toutes leurs prises. Ma mère a alors demandé à mon père s’il avait vu beaucoup de caribous, et il lui dit que oui. Elle lui a demandé ensuite combien il en avait tué, il lui a répondu qu’il en a pris seulement pour leurs besoins; il en avait tué neuf. »
Alexandre Pinette, Innu