« La forêt, c’est notre maison, c’est notre pharmacie, c’est notre garde-manger, c’est notre église, c’est notre école. »
Jean-Marc Niquay, Atikamek Nehirowisiw
« Moi aussi, j’ai été guéri. J’ai passé un été à Pointe-Bleue et j’avais une pierre aux reins. Ils étaient prêts à m’opérer à l’hôpital, mais je suis allé voir une personne qui m’a donné des plantes, et ça a passé. »
John Mowatt, Anishinabe (Algonquin)
« Il n’y a pas juste les plantes, mais aussi les animaux, comme le castor et sa glande qui produit le castoréum. Mon père s’est coupé avec la hache et c’est avec ça qu’il s’est soigné, il s’est fait un cataplasme. Il y a aussi des parties de l’orignal, comme le foie, qui font des médicaments. »
Inventaire participatif, Atikamekw Nehirowisiwok
« Quand le bateau de ravitaillement arrivait, les gens tombaient malades et je n’y ai pas échappé. Mes parents m’avaient donné à boire le contenu d’un estomac de caribou, un liquide à l’intérieur du qisaruaq (premier estomac du caribou). »
Lizzie Irniq et Alasie Koneak, Inuit
Avant la médecine moderne et les médicaments industriels, les autochtones ont survécu en découvrant les éléments guérisseurs dans leur environnement. Visant à guérir ou à prévenir, leur médecine est basée sur la science des ressources du territoire.
Les plantes et certaines parties animales ou les minéraux, comme l’argile, possèdent des qualités médicinales pour les humains. Il s’agit d’une science développée sur des milliers d’années. Il fallait trouver quelles parties des différentes ressources utiliser et quelles pouvaient être leurs interactions possibles. Il fallait aussi savoir comment préparer les différentes recettes pour en conserver les éléments actifs et découvrir la meilleure manière de les conserver. Cette connaissance était détenue par des spécialistes dans chaque communauté.
1. Rognon de castor
« Tu le mets sur des plaies qui ne se soignent pas. Quand tu as un ongle incarné, ça aide. »
Marie-Luce Crépeau-Fontaine
Uashat mak Mani-Utenam community inventory
La Boîte Rouge vif archives and the Uashat mak Mani-Utenam community, 2006
2. Racines de savoyane
« Elles sont bonnes pour soigner un mal de gorge, les yeux rouges (à cause d’un courant d’air),
une infection de l’œil, des boutons dans la bouche. »
Marie-Luce Crépeau-Fontaine
Inventaire communautaire d’Uashat mak Mani-Utenam
Archives de La Boîte Rouge vif et communauté d’Uashat mak Mani-Utenam, 2006
3. Écorce de tremble
« Elle sert à soigner quelqu’un qui a mal au foie. »
Marie-Luce Crépeau-Fontaine
Inventaire communautaire d’Uashat mak Mani-Utenam
Archives de La Boîte Rouge vif et communauté d’Uashat mak Mani-Utenam, 2006
4. Argile
Photographie : Olivier Bergeron-Martel
« La savoyane, c’est bon pour des problèmes dans la bouche, surtout les ulcères et les abcès. Mais, par contre, il y a une période pour la cueillir : l’automne, à la pleine lune. »
Jean-Paul O’Bomsawin-Lamirande, Waban-Aki (Abénaquis)
Toutes les plantes ont un potentiel médicinal, mais plusieurs facteurs doivent être considérés pour l’optimiser. Premièrement, la plante possède plus de pouvoir médicinal si elle est cueillie en période de pleine lune. Ce pouvoir est encore plus fort si la plante est cueillie lorsque le soleil est haut dans le ciel, vers 14 h ou 15 h. À ce moment, pour se protéger, la plante dégage une grande quantité d’huile essentielle contenant le maximum de propriétés curatives.
Deuxièmement, pour maximiser le potentiel de la plante, il faut l’accepter et se faire accepter par elle; il faut la complimenter et en prendre bien soin. Il ne faut jamais cueillir toute la plante, il faut en laisser pour la reproduction.
Michel Durand-Nolett (Waban-Aki (Abénaquis)),
Louis-Albert Dionne et Daniel Brière (Wolastoqiyik (Malécite)).
Images : Carl Morasse
« Il y a des doses à respecter, ce sont des médicaments comme ceux qu’on a aujourd’hui en pharmacie. Ce n’est pas parce que c’est naturel qu’on peut exagérer. »
Michel Durand-Nolett, Waban-Aki (Abénaquis)
Savoir prendre la bonne quantité est très important. En général, pour mesurer la quantité nécessaire pour une personne, il faut se fier au creux de sa main. Une personne ne peut pas mesurer la dose requise pour une autre.
Michel Durand-Nolett (Waban-Aki (Abénaquis)) et Daniel Brière (Wolastoqiyik (Malécite))
Images : Carl Morasse
Seul un expert de l’usage peut déterminer la meilleure façon d’apprêter la ressource.
Infusion
Pour une infusion ou une tisane, il faut mettre la plante dans l’eau bouillante et laisser reposer le liquide le temps prescrit. Avant de le boire, il faut le filtrer.
Décoction
Contrairement à l’infusion, pour la décoction, il faut faire bouillir la plante fraîche le temps recommandé. Ensuite, il faut filtrer et boire le liquide.
Cataplasme
Le cataplasme demande la préparation d’une pâte faite à partir d’une plante broyée ou écrasée. Il est alors appliqué directement sur la peau ou maintenu entre deux pièces de coton à l’aide d’un bandage.
Autres méthodes
Il est aussi possible de manger ou de mâcher les plantes fraîches ou encore d’appliquer certaines parties ou des feuilles entières directement sur la peau. Certaines préparations exigent de faire sécher la matière première et ensuite de la réduire en poudre. La poudre peut ensuite servir à faire des préparations pour les cataplasmes ou encore des tisanes.
1-2. Thé du Labrador
Photographies : Olivier Bergeron-Martel
3. Onguent innu à base de gomme de sapin
« Il sert à soigner l’eczéma, les boutons, les piqûres d’insectes, la constipation et les hémorroïdes. »
Marie-Luce Crépeau-Fontaine
Inventaire communautaire d’Uashat mak Mani-Utenam
Archives de La Boîte Rouge vif et communauté d’Uashat mak Mani-Utenam, 2006
4-5. Katìa Benite (Guarani (Brésil))
Photographies : Mendy Bossum-Launière
Archives de La Boîte Rouge vif, 2012
La médecine traditionnelle autochtone ne vise pas seulement la guérison des blessures ou des maux physiques, elle s’inscrit plutôt dans une approche holistique qui constitue une philosophie de vie.
« Définir l’approche globale en milieu autochtone, c’est l’interdépendance entre tous les éléments; il n’y a pas un élément isolé en soi, tout est relié. »
Hélène Boivin, Ilnu
Cette philosophie est souvent exprimée par la « Roue de médecine ». Il s’agit d’un cercle divisé en quatre par un axe vertical et un autre horizontal. Leur jonction, le centre du cercle, représente un état de santé idéal; un équilibre absolu. Afin d’être en santé, chaque personne devrait travailler à tendre vers cet équilibre. Chacun des quartiers du cercle représente une sphère de la personne : le physique, le mental, l’émotionnel et le spirituel. Ces sphères sont en interinfluence. Reconnaître un déséquilibre dans l’une d’elles signifierait qu’il y a déséquilibre également dans l’une ou l’ensemble des autres sphères. Dans un processus de guérison, il faut donc porter attention à tous ces éléments.
Source : Bergeron-Martel, Olivier (2011). « La transmission et la pratique de la médecine traditionnelle ilnue au sein du Parc Sacré Kanatukuliuetsh Uapikun de Mashteuiatsh : une recherche collaborative valorisant l’initiative culturelle communautaire ». Mémoire de maîtrise, Université du Québec à Chicoutimi.